vendredi 23 mai 2008

chapitre 2

Chapitre 2

Un an auparavant, Lorenzo se tenait devant son oncle Giuseppe Lippi, le frère de sa mère, qui l’avait élevé :- « Cette expérience stupide est la dernière que vous tenterez aussi bien à Florence qu’à Pise. Risquer d’enduire de blancs et de jaunes d’oeufs tous les notables de la ville qui se rendent à la grand messe, sous prétexte que vous vouliez étudier la différence dans la vitesse de leurs chutes respectives entre 5 livres de plumes et 5 livres d’œufs de poules !!! »Lorenzo, baissait la tête, contrit.- « et entraîner dans vos bêtises Giacomo Galilée, un enfant de 7 ans, en le promouvant votre « assistant », pour les lui faire lancer du haut de la « torre pendante » écumait l’oncle Guiseppe. - « L’expérience aurait été plus intéressante du haut de la tour Asinelli, à Bologne ! » avança Lorenzo.- « Taisez-vous, je ne veux plus entendre une seule bêtise sortir de votre bouche !»Lorenzo rentra la tête entre ses épaules.- Le jeune Giacomo avait la garde de son petit frère Galileo, qui n'a pas un an et qui s'époumonait au pied de la tour ? C’est ainsi qu’il a attiré l'attention du vicaire. Et son habit a été couvert d'oeufs cassés et de plumes qui se sont collées dessus ».Lorenzo, qui avait toujours trouvé que le vicaire ressemblait à un gallinacé riait sous cape, mais il faisait semblant d'être contrit.- « Après votre précédente tentative de mélanger dans un alambic plusieurs produits mal au hasard, ce qui a abouti à l’explosion des écuries de M. Galilée, je ne peux plus vous laisser à Pise. Vous mettriez la ville à feu et à sang. »- « Pas au hasard, j’ai pris des notes… Ce n’était pas le résultat que j’espérais, mais il faut bien tenter des expériences si l’on veut faire avancer la science », avança Lorenzo.
« Votre grand-père le cardinal, ne serait pas fier de vous ». Lorenzo avait en effet dans son ascendance un cardinal et plusieurs nonnes… Il avait vécu toute sa petite enfance, dans un couvent, auprès de sa mère. Mais il manquait un peu de repères. Sa mère se passionnait pour la peinture comme avant elle son grand-père et son oncle … Elle n’avait aucune vocation pour la maternité. Lorenzo s’était investi dans l'étude, et cherchait dans les sciences des repères. Entre autres choses, il se passionnait pour les sciences expérimentales … L’oncle Guiseppe prétendait que ses expériences avaient surtout comme conséquence de provoquer des catastrophes. C’est pourquoi, quand il avait eu 14 ans, il lui avait accordé des subsides pour commencer des études de médecine, science moins risquée, à l’université de Pise qui était fort réputée. Il logeait chez une famille alliée de la sienne, les Galilée. « J’ai décidé de prendre une décision radicale vous concernant et j’ai écrit à madame Caterina, votre cousine. Car le fameux grand-père cardinal était un Médicis : Lorenzo se trouvait donc être un parent de la reine de France.- « Une ambassade doit quitter la ville de Florence pour Paris la semaine prochaine et vous partirez avec elle. Ses membres doivent rejoindre la reine à Moulins. Au mieux, Madame Caterina vous prendra comme page, au pis, on vous trouvera bien, au fin fond de ce Bourbonnais sauvage, un emploi de vicaire dans une obscure cure de campagne … »Lorenzo ne trouva rien à répondre : depuis longtemps, la cour de France invitait nombre de savants, architectes et artistes. Parmi eux le grand Leonardo, dont il admirait tant le travail… notamment ces fabuleuses machines dont il avait vu des dessins au palais ducal. Il espérait bien échapper au destin d’un vicaire de campagne. Il prit congé de son oncle et tournant le dos, récupéra une étrange planche qu’il avait déposée contre le mur à son arrivée. « Et qu’est-ce que c’est que cette chose ?- Ma planchette roulante ? C’est très pratique pour traverser les couloirs de votre palais. Je pose le pied droit dessus, prends de l’élan avec le pied gauche et je roule d’une traite jusqu’à la sortie …. - Et vous cassez les pots d’orangers dont je prends si grand soin ! Confisqué ! Je vais immédiatement jeter au feu ce diabolique engin …

vendredi 16 mai 2008

chapitre premier

Le jeune Lorenzo Lippi n'était pas enthousiaste devant la mission que lui venait de lui confier maître Michel Péant, le maître de l’Hôtel Dieu Saint Julien. Il s’était fait une telle joie de participer, en compagnie de sa cousine Marguerite au concours de poésie organisé par maître Jacques Amyot pour restaurer une tradition de la cour de Moulins. Le thème retenu : « je meurs de soif auprès de la fontaine » était repris de Charles d’Orléans et inspiraient les deux adolescents… Le seigneur de Brantôme devait aussi y participer et Lorenzo se faisait un vrai plaisir de le défier et de le vaincre dans cet exercice.
Depuis qu’elle était devenue veuve, la reine Catherine séjournait régulièrement dans la capitale du duché qui lui avait été attribué en douaire : il faut croire que le pavillon qu’un demi siècle plus tôt, la duchesse Anne avait fait construire dans le style italien, lui rappelait sa ville de Florence. Pour échapper au Louvre et à son atmosphère pesante, elle y venait le plus souvent possible, s’identifiant à cette femme à la brillante intelligence politique, qui avait été elle aussi régente de France. En 1564, elle avait engagé son fils, le jeune roi Charles à faire un grand tour de France pour se faire reconnaître par ses sujets : et Moulins était idéalement située au cœur de la France pour mener à bien ce projet. Ainsi, la cour de Moulins avait-elle retrouvé un peu du faste qu’elle avait connu à l’époque où Anne, sa fille Suzanne et son mari, le connétable Charles, en avaient fait l’une des plus brillantes d’Europe. Madame Catherine avait commandé des travaux d’aménagement.
En ce lieu, on vivait des instants privilégiés, alors que depuis une dizaine d’années, le royaume de France était en proie à une guerre civile. Mais depuis qu’en 1562, les Huguenots avaient échoué dans leur tentative de siège de la capitale du Bourbonnais, cette dernière était un havre de paix pour la reine et ses enfants…
Lorenzo, avait été exilé de Florence par son oncle, qui pensait qu’il trouverait auprès de cette lointaine cousine, une main ferme pour le guider. Elle avait trouvé à l’occuper dans l’Hôtel Dieu saint Julien, où les anciens serviteurs de la royauté dépourvus de famille trouvaient à s’héberger dans leurs années de vieillesse.
Maître Michel, en plus d'être maître de l'hôpital Saint Julien, de Moulins, était aussi curé de Cressanges. Et plutôt que de se rendre lui-même dans sa paroisse, ou de demander à son vicaire de faire le déplacement vers la capitale du duché, c’est lui, Lorenzo, qu’il envoyait dans ce village, distant d'au moins 5 lieues, pour aller percevoir les 50 livres de revenus de la cure et organiser l'ouverture d'écoles de grammaire !
Car maître Michel souhaitait faire prendre des responsabilités à son jeune écolier.
- « Vous avez l’âge du jeune duc d’Alençon, que sa mère s’apprête à nommer lieutenant général du royaume. Et le roi Charles, à votre âge, avait déjà été couronné depuis cinq ans. Madame Caterina vous a confié à moi : il est temps que l’on mette un peu de plomb dans votre tête folle ».
Lorenzo avait le même âge que son cousin Alexandre, le jeune duc d’Alençon,que l’on appelait désormais Henri. Mais le deuxième fils de Catherine, le préféré de sa mère, était déjà bien impliqué dans les affaires politiques, et n'était pas un compagnon très gai. Il lui reprochait sa brutalité envers sa jeune sœur : aussi avait-il surtout beaucoup sympathisé avec la jeune Marguerite, alors âgée de 13 ans et qu’il sentait comme lui très solitaire. Brantôme devait vanter, plus tard, sa beauté « parfaite ». C’était alors une très gentille jeune fille, intelligente et réservée. Ses deux sœurs aînées étaient mariées et sa mère était toute dévouée à ses fils pour lesquels. Elle était alors très occupée à œuvrer pour qu’Henri puisse monter sur le trône de Pologne. Elle n’entretenait avec la fillette, qui lui vouait une grande admiration, que des rapports distants. En plus d’un intérêt pour la poésie, encouragé par sa tante paternelle qui lui avait donné son prénom, Marguerite partageait avec Lorenzo un goût prononcé pour les sciences et l’observation des astres : en compagnie de leur précepteur, tous deux montaient, à la nuit tombée sur les courtines de la vieille tour du château, qu’on appelait « mal coiffée ».
Madame Catherine, s’était un peu reconnue en lui : un garçon intelligent, entreprenant, mais bridé par une éducation austère, semblable à ce qu’avait été la jeune fille de Florence envoyée à la cour France pour épouser un inconnu. Elle avait eu connaissance de ses frasques, qui avait conduit l’oncle Guiseppe à l’éloigner de Toscane. Et elle avait beaucoup ri. Elle avait jugé opportun, puisque Lorenzo avait commencé à Pise des études de médecine, de le confier en apprentissage au barbier de l’hôpital Saint Julien : il apprenait auprès de ce praticien expérimentés l’art des simples et des potions. Son intelligence vive l’avait aussi rapidement fait remarquer par maître Michel.

les musards de Cressanges

Depuis le temps que j'essaye d'écrire un roman, je vais commencer par un petit format (du type "roman jeunesse"), avec un jeune héros de 15 ou 16 ans. Et broder à partir du thème suivant :


En 1560, N. de Nicolay rapporte :
« le mardi de chacun mois de mars, (les paroissiens de Cressanges) sont tenus se venir présenter, au lever du soleil, dans le cimetière de la dite paroisse, et là demeurer et se promener sans sortir dehors, sinon en cas de grande nécessité, jusques au soleil couché, se faisant apporter leur boire et leur manger, sans oser parler les uns avec les autres ; et si, par inadvertance quelqu’un leur demandoit le chemin ou autre chose, ne leur doivent respondre autre chose, fors {sauf}, leur faisant la moue, leur dire : Mars, mars est mars ; à Cressanges sont les musars ».
S’ils manquaient à cette obligation, ils étaient tenus de payer au seigneur des Noix : sept sols six deniers d'amende.