vendredi 26 juin 2009

haies et chemins creux



C'est au XVIe s., que le paysage de bocage si caractéristique de la campagne bourbonnaise s'est développé. Les plus anciens terriers (des documents fiscaux qui décrivent les parcelles avec précision) mentionnent des fossés qui séparent ce que l'on nomma au XIXe s. des "domaines", mais qu'on appelle alors des "ténements", "mas" ou "métaineries" (qui n'ont rien à voir avec le métayage ou bail à mi-fruit). Deux "terroirs" sont peu à peu délimités par des "turaux", qui sont des levées de terre. Peu à peu, ces dernières sont "végétalisées", grâce à des arbustes (sureaux, églantine, pruneliers) ou des arbres (chênes, noyers...).
Dans l'actuelle communauté de communes "bocage sud", ce qui est caractéristique, c'est que le bocage est souvent associé à un réseau de chemins "creux", en contrebas des champs et des prés.
Ces constructions humaines sont de remarquables ouvrages quand on songe que les chemins creux ont creusés à la pioche. Je m'interroge sur leur datation et je ne serais pas étonnée qu'on soit en présence d'élements résiduels d'un paysage beaucoup plus ancien. Car s'il est revitalisé au XVe et XVIe s., le bocage a sans doute existé aussi à la pérode celtique comme certaines photos aériennes prises en Bretagne tendraient à le démontrer.
Ces quelque photos du paysage actuel restituent assez bien celui qu'a dû connaître Lorenzo, une fois passés ce que les géographes appellent l'"hinterland" moulinois, au delà du pont Chinard (qui rappelle l'emplacement du petit pont Eschinard), entre Neuvy et Cressanges.






























mercredi 17 juin 2009

le prieuré de Moladier

source : M. Génermont

Où l'on découvre que Marguerite de Valois est à l'origine des SMS...

J'ai apporté quelques modifications au chapitre 4 : et l'on découvre qu'avec ses 3 "pigeonnes" voyageuses Sybille, Morgane et Séléna, pour communiquer rapidement avec son cousin, la jeune Margot est l'inventrice du Short Message Service.

dimanche 14 juin 2009

la mysoginie des clercs

Je n'ai pas inventé les propos du frère Pasquet : ceux que je lui fais tenir, et bien pis encore !, sont des extraits d'un livre traduit du latin en français (dont l'auteur me demeure inconnu mais qui n'était pas unique en son genre au sein de l'université) publié en 1585 chez Du Puys et intitulé "Thrésor des remèdes secrets pour les maladies des femmes".
De nos jours encore, beaucoup de bêtises sont dites, au nom de la "science". Pas plus tard qu'avant hier, au café philo, j'ai entendu un tenant de la psychanalyse, qui doit être convaincu qu'il n'a aucun a priori contre les femmes, expliquer que les femmes ayant, au contraire des hommes, une tolérance à la frustration étaient incapables de produire une oeuvre d'art.

chapitre 6

Maître Du Quesnay chantait à tue-tête une chanson dans laquelle il était question de moines et de vin quand ils se remirent en route pour le prieuré de Moladier, au travers d’une forêt qui devenait de plus en plus dense. Ça ou là, s’ouvrait une clairière : autour de cabanes en bois, couvertes de feuilles s’activaient des hommes. De la fumée s’échappait du toit en chaume :
- Il existe aussi des mines de charbon de terre à Châtillon, à 1 lieue et demie de Cressanges, dit maître Duchapt. Les habitants en tirent de très bons revenus. Mais avec les progrès réalisés dans l’art de la guerre, l’on a besoin du charbon de bois pour fabriquer de la poudre à canon.
- Ah oui, dit Lorenzo : c’est en effet l’un des trois composants ! Mon expérience a été ratée car je ne disposais pas de poudre de qualité. L'année précédente, pour l'anniversaire de sa mère, il avait tenté de réaliser le plus beau feu d’artifice de Florence… Mais avait dû trouver une autre idée de cadeau. Il avait eu l’occasion de rencontrer à Moulins des Italiens et avait constaté qu'ils semblaient aussi, dans cette ville, détenir le quasi monopole de la fabrication des brigandines et des boulets...
- Les charbonniers de la forêt tolèrent assez mal la concurrence du charbon de terre : il faut dire que n’est pas charbonnier qui veut ! Cette société est très refermée sur elle-même et l’on dit qu’elle transmet en son sein des rites centenaires. Mais tout charbon nous est utile : nous avons de plus en plus besoin de combustible pour les nouvelles industries. Moulins commence à se faire une certaine renommée celle du couteau .
Maître Duchapt avait jugé opportun d’allonger un peu le chemin et c’est un peu dégrisé que son compère, Lorenzino et lui-même atteignirent le lieu où ils avaient rendez-vous avec le garde du marteau des Eaux et Forêts. La communauté des moines ne comptait pas plus de 3 frères. Le prieur était un ami de maître Péant et il aimait tenir table ouverte. Pour d’éventuels pélerins…. - « Mais nous ne sommes pas dérangés très souvent, convint-il ».
Et surtout, c’était un rendez-vous pratique pour que les édiles moulinois rencontrent les officiers des Eaux et Forêts… Au cours de l’après-midi, les deux échevins partirent choisir les arbres qui permettraient de tailler de longs paux (un pal – des paux) afin de réparer les ponts de la ville. On les marquerait du sceau des Eaux et Forêts pour les réserver.
Lorenzino nourrit ses trois tourterelles puis profita de ces moments de solitude pour sortir de sa besace une main de papier. Le temps passa agréablement…. Depuis qu'il s'exerçait en compagnie de sa cousine Marguerite, il avait de plus en plus de facilité à écrire des poèmes et espérait bien ne pas rater le prochain concours de poésie qui devait se dérouler dans 6 mois. Il comptait également épater Margot avec quelques vers bien troussés… que lui avaient inspiré les fées des bois de Moladier… Et plus particulièrement celle qui s’était matérialisée à ses yeux devant l’auberge de Coulandon.
A la nuit tombante, on l’appela pour partager le repas du soir. Les deux échevins avaient résolu de passer la nuit au prieuré, le vent s’annonçant violent. Mais ils partiraient à l’aube. Et le jeune homme ferait le reste du trajet jusqu’à Cressanges en compagnie de maître Jacques le Martel qui y demeurait ordinairement. Un homme se présenta. Un pèlerin ? Quand il émergea de l’obscurité, Lorenzo remarqua aussitôt le regard noir, brûlant de fièvre, du frère Pasquet qui semblait suffire à alimenter les conversations de son entourage.
- Soyez le bienvenu, frère Pasquet, l’accueillit le prieur. Voulez-vous partager notre repas ?
- Nous sommes en plein Carême, je ne mange pas, s'indigna le dominicain.
- Mais ce n’est qu’une simple omelette.
- C’est encore trop pour qui veut arriver à communiquer directeemnt avec le Très Haut : je me sustente d’un simple quignon de pain et bois juste un verre d’eau claire pour me purifier avant la prière de prime et un second après la prière de vespre. Je vous serais reconnaissant de bien vouloir m’offrir l’hospitalité dans votre grange pour cette nuit.
Et il alla s’asseoir à l’écart.
Maître Duchapt et maître Du Quesnay décidèrent d’anticiper leurs adieux à Lorenzino. Ce dernier avait bien cru remarquer qu’ils craignaient autant frère Pasquet que la peste. Ils l’encouragèrent beaucoup pour sa mission : « L’éducation des garçons, mais aussi des filles est un beau projet…. »
Maître DuQuesnay n'eut pas le temps de finir sa phrase. Du fond de la pièce, une voix s’éleva :
- « Blasphème ! les filles n’ont pas à connaître ce que vous prétendez leur enseigner… Le Créateur ne leur a pas donné un tête pour penser… Leur constitution est molle et leur corps imbécile. Ce qui fait que la vie des femmes n’est pas une vie mais une langueur misérable. Très certainement, si ce n’était leur fécondité, il vaudrait mieux pour elles mourir dès leur naissance. Quant aux garçons, il serait plus utile, comme je l’ai suggéré au frère Guillaume, de saint Jean de Bardon, plutôt que de leur enseigner des choses futiles, de les envoyer silloner les villages à la recherche de mauvaises actions à dénoncer.
Son intervention avait interrompu des adieux chaleureux et les deux échevins s’enfuirent vers la chambre qui leur avait été réservée. Lorenzo ne tarda pas à gagner le dortoir des moines qui lui avait été assigné. Il commençait à être un peu effrayé par les propos. Il avait entendu dire, qu’ à Florence, qu’au siècle passé, un autre dominicain avait, par des idées aussi intransigeantes, mis cette belle ville de à feu et à sang. Le frère Girolamo Savonarole avait fini au bûcher. Madame Catherine et son chancelier, Monseigneur de L'Hospital, avaient déjà tant à faire pour éviter les affrontements entre catholiques et membres de la religion réformée (1) : l'inquisiteur était capable de dresser les uns contre les autres ceux qui restaient fidèles au pape.
(1) on disait la RPR : religion prétenduement réformée.